Le Colonel Lyle C.
Rumford mène ses troupes à la baguette. Responsable d'une académie
militaire, il voit d'un très mauvais œil le projet de William
Haynes. Déjà que les deux hommes se détestent rigoureusement, le
petit-fils du fondateur de l'académie a en effet parmi ses
documents, un plan de l'établissement auquel il a ajouté des
sections supplémentaires qui devraient accueillir prochainement de
jeunes femmes si les membres du conseil d'administration adoptent son
projet. Une idée inconcevable pour le Colonel Rumford qui pour y
couper court décide d'éliminer William Haynes. Lors de
l'anniversaire commémoratif de la fondation Haynes, le colonel
Rumford se débrouille pour que son rival procède au tir de canon en
vigueur. Mais ce que ce dernier ne sait pas, c'est que la veille au
soir, le colonel a subrepticement enfoncé un chiffon de nettoyage
dans le canon et a également ôté la poudre de l'obus qui doit être
tiré par un explosif beaucoup plus puissant. Lorsque Haynes procède
au tir, c'est le drame. Le canon explose et l'homme meurt. C'est
alors qu'arrive sur place le lieutenant Columbo...
Troisième épisode de la
quatrième saison, Entre le Crépuscule et l'Aube (By
Dawn's Early Light) est le premier des quatre que réalisera
Harvey Hart entre 1974 et 1976 et le premier des quatre également
auquel participera l'acteur et réalisateur irlando-américain
Patrick McGoohan, d'abord célèbre pour avoir incarné le Numéro
6 de la série culte Le
Prisonnier en
1967/68. Concernant ce dernier, les choses sont en réalité beaucoup
plus complexes puisque outre le fait qu'il ait interprété à quatre
reprises le rôle de l'assassin dans la série, Patrick McGoohan a de
plus écrit le scénario de deux d'entre eux et en a réalisé cinq
dont La Montre Témoin
(Last Salute to the Commodore)
en 1976 et Meurtre en Musique
(Murder With Too Many Notes)
en 1999 dans lesquels il n’apparaît pas. Le point commun entre ses
différentes apparitions dans la série est ce ton presque monocorde,
cette attitude hautaine et cette implacable froideur que partagent
chacune de ses incarnations. Dès Entre le
Crépuscule et l'Aube,
l'acteur se montre sinistre, d'une humeur linéaire, d'un tempérament
vieux jeu, acariâtre et autoritaire. Un comportement qui participe
de l'élaboration du meurtre puisque le Colonel Rumford qu'il
interprète n'hésitera pas à utiliser le cadet Roy Springer
(l'acteur Mark Wheeler) comme bouc émissaire...
La
particularité de cet épisode provient donc du contexte puisqu'en
s'imposant en ce lieu unique dans lequel il mangera, se douchera et
se nourrira tout en continuant à mener son enquête, le lieutenant
Columbo passera l'intégralité de Entre le
Crépuscule et l'Aube à
côtoyer cadet, bizuts et officiers. C'est ainsi donc qu'on le verra
notamment manger au mess à la table du colonel, se laver dans les
mêmes lavabos que les cadets, être brutalement réveillé au son du
clairon (dans le meilleur des cas) ou par un soldats inconscient de
réveiller non pas l'un des siens mais un lieutenant de police (dans
le pire). Si Patrick McGoohan est parfois glaçant, Columbo est par
contre tout à fait touchant dans ses rapports avec les jeunes
militaires. Et notamment en ce qui concerne le récit tournant autour
d'un trafic de cidre qui plus que de n'être qu'un sujet
d'arrière-plan anecdotique, permet au scénario de Howard Berk de
mettre en place toute une stratégie devant porter ses fruits lors
des derniers instants.
Autre
particularité de cet épisode, le meurtre : Si la série nous a
jusqu'à maintenant habitué à des assassinats dont la forme se
révélait généralement des plus classique, le meurtre de Entre
le Crépuscule et l'Aube
a ceci d'exceptionnel que le meurtrier agit en spectateur lorsqu'il
survient. Devant l’énormité de l'événement, il demeure
logiquement impossible de confronter le téléspectateur avec ce que
l'on peut imaginer comme étant sans doute le meurtre le plus violent
et le plus sanglant de toute la série (les débris du canon en
témoignent). Comme par un fais étrange, et malgré la dureté du
personnage, le spectateur pourra éprouver de la mélancolie mêlée
d'amertume devant ce très haut gradé froid, dénué de sentiments,
et pourtant relativement touchant dans sa vision éculée de l'armée.
Patrick McGoohan l'incarne si parfaitement que l'on a tendance
peut-être à mêler le personnage et son interprète. Une étrange
relation se noue entre le militaire et le policier. Si le lieutenant
Columbo garde comme objectif de faire tomber le coupable, on sent
tout le respect qu'il éprouve pour ce militaire de carrière. Un
Columbo
sous forme de huis-clos original et relativement séduisant...
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