lundi 7 septembre 2020

Eaux troubles de Ben Gazzara (1975) 🚬 🚬 🚬 🚬 🚬



Après avoir réalisé l'excellent En Toute Amitié (A Friend in Deed), huitième épisode de la saison précédente de Columbo, l'acteur-réalisateur et ami de Peter Falk, Ben Gazzara revenait à la réalisation l'année suivante en 1975 avec Eaux troubles (Troubled Waters), l'un des tout meilleurs épisode de la première époque de la série. Pour celui-ci, Ben Gazzara, sur une histoire de Jackson Gillis et un scénario de William Driskill, met en scène un épisode qui ne se situe pas à Los Angeles comme dans une grande majorité des soixante-neuf qui constituent la série mais à bord d'un paquebot de croisière à destination de Mazatlán au Mexique. Un navire à bord duquel le célèbre lieutenant de la police criminelle croisera la route de centaines de passagers parmi lesquels, cependant, il ne mettra pas longtemps à découvrir le nom de l'auteur du meurtre dont sera victime la chanteuse Rosanna Wells interprétée par l'actrice Poupée Bocar dont il s'agira du dernier rôle. Assassinée par Hayden Dansigger, un homme riche et marié avec lequel elle a eu une liaison et qu'elle fait désormais chanter afin de lui soutirer de l'argent, la jeune femme est tuée par arme à feu dans sa loge lors d'un entracte...

Dans cet épisode, on retrouve notamment l'acteur Dean Stockwell dont le personnage d'Eric Wagner fut trois ans auparavant la victime d'un meurtre dans l'épisode Le Grain de Sable (The Most Crucial Game) de Jeremy Kagan. Désormais, il incarne celui du pianiste Lloyd Harrington, lui-même ancien amant de la future victime et sur lequel repose au départ des soupçons après qu'il ait été au centre d'une dispute avec la chanteuse. Afin de se constituer un alibi, Hayden Dansigger simule une crise cardiaque dans la piscine du navire et se retrouve le soir-même de l'assassinat hébergé à l'infirmerie. De plus, l'homme tente par tous les moyens de faire accuser le pianiste. Columbo, qui après avoir précisé au capitaine Gibbans (Patrick Macnee de la série Chapeau Melon et Bottes de Cuir) qu'il fait partie de la police criminelle au début de l'épisode est dépêché sur les lieux de l'assassinat afin d'enquêter sur le meurtre. Mais alors qu'il se sent mal, il est dirigé à son tour vers l'infirmerie afin d'être pris en charge par l'infirmière. Là, il trouve devant la porte de la chambre où se trouve allongé Hayden Dansigger, une plume. L'indice qui lui permettra de comprendre que l'homme dont il sait pourtant qu'il a été apparemment victime d'une crise cardiaque est sans doute l'assassin de Rosanna Wells...

On retrouve également parmi les interprètes de cet épisode, l'acteur Bernard Fox qui interpréta le rôle du Détective de la police de Scotland Yard, William Durk. Il demeure une ambiguïté au sujet du malaise ressenti par Columbo à la découverte du corps de la victime. Surtout que la série nous a jusqu'à maintenant habitué à penser que le lieutenant est sensible à la vue du sang. Pourtant, certains détails laissent véritablement penser que le mal dont est atteint Columbo à ce moment précis du récit est en fait directement lié au tangage du navire. À noter d'ailleurs que Eaux troubles à réellement été tourné à bord d'un navire comme en témoigne l'équilibre précaire de certains interprètes lors de différentes séquences. Face à Peter Falk, l'assassin est interprété par l'immense acteur Robert Vaughn qui outre une longue carrière sur grand écran (Le Pont de Remagen de John Guillermin en 1969) fut célèbre pour avoir notamment interprété le rôle de Napoléon Solo dans la mythique série télévisée Des Agents très Spéciaux entre 1964 et 1968...

S'il est reconnu que l'épouse de Columbo est bien réelle même si les spectateurs n'ont jamais eu l'occasion de la découvrir ne serait-ce qu'une seule fois parmi les soixante-neuf épisodes que compte la série, ceux-ci n'ont jamais été aussi proches de la découvrir que dans cet épisode puisque comme le souligne le lieutenant, elle et lui ont gagné une croisière. C'est ainsi la raison pour laquelle ils se retrouvent à bord du navire tous les deux. Si Columbo l'évoque à diverses reprises, le petit jeu auquel s'adonnent le réalisateur et le scénariste au sujet de sa femme est au moins aussi savoureux que cette touchante tentative de rapprochement entre Columbo et une certaine frange de la population qui depuis toujours s'avère dédaigneuse envers lui. Alors qu'en général l'apparition de Columbo succède à une longue introduction menant au meurtre, dans Eaux troubles il apparaît à l'image après seulement dix secondes. Si le commandant de bord fait au début référence à l'éternel accoutrement du lieutenant (celui-ci rétorquant innocemment un ''on m'a dit qu'il faisait toujours très beau à cette époque de l'année''), on le découvrira plus tard affublé d'une chemise quelque peu ''barriolée'', chose peu habituelle chez Columbo, mais dont les teintes ne dépareillent absolument pas avec celles qu'il a pour habitude de porter...

La confrontation entre le lieutenant et l'assassin est absolument formidable. Mais ce qui l'est certainement plus encore, c'est l'excellent scénario. Outre le concept jamais anodin de demander au meurtrier lui-même de l'aider à enquêter sur l'assassinat de la chanteuse, les capacités d'analyse de Columbo sont ici exploitées à leur maximum. En réfléchissant à chaque détail tout en faisant profiter comme à son habitude aux spectateurs de ses diverses déductions, Columbo met surtout en place un piège autour du meurtrier dont ce dernier, particulièrement hautain, ne se doutera jamais des conséquences. En résulte un final absolument jouissif lors duquel Hayden Dansigger est mis face à ses contradictions. De manière tout à fait exemplaire, le lieutenant démonte un à un tous les objectifs du meurtrier censés mener à son indéboulonnable alibi. Drôle, dépaysant, frais et diablement construit, Eaux troubles fait sans aucun doute partie des dix meilleurs épisodes de toute la série...

jeudi 3 septembre 2020

Entre le Crépuscule et l'Aube de Harvey Hart (1974) 🚬 🚬 🚬 🚬



Le Colonel Lyle C. Rumford mène ses troupes à la baguette. Responsable d'une académie militaire, il voit d'un très mauvais œil le projet de William Haynes. Déjà que les deux hommes se détestent rigoureusement, le petit-fils du fondateur de l'académie a en effet parmi ses documents, un plan de l'établissement auquel il a ajouté des sections supplémentaires qui devraient accueillir prochainement de jeunes femmes si les membres du conseil d'administration adoptent son projet. Une idée inconcevable pour le Colonel Rumford qui pour y couper court décide d'éliminer William Haynes. Lors de l'anniversaire commémoratif de la fondation Haynes, le colonel Rumford se débrouille pour que son rival procède au tir de canon en vigueur. Mais ce que ce dernier ne sait pas, c'est que la veille au soir, le colonel a subrepticement enfoncé un chiffon de nettoyage dans le canon et a également ôté la poudre de l'obus qui doit être tiré par un explosif beaucoup plus puissant. Lorsque Haynes procède au tir, c'est le drame. Le canon explose et l'homme meurt. C'est alors qu'arrive sur place le lieutenant Columbo...

Troisième épisode de la quatrième saison, Entre le Crépuscule et l'Aube (By Dawn's Early Light) est le premier des quatre que réalisera Harvey Hart entre 1974 et 1976 et le premier des quatre également auquel participera l'acteur et réalisateur irlando-américain Patrick McGoohan, d'abord célèbre pour avoir incarné le Numéro 6 de la série culte Le Prisonnier en 1967/68. Concernant ce dernier, les choses sont en réalité beaucoup plus complexes puisque outre le fait qu'il ait interprété à quatre reprises le rôle de l'assassin dans la série, Patrick McGoohan a de plus écrit le scénario de deux d'entre eux et en a réalisé cinq dont La Montre Témoin (Last Salute to the Commodore) en 1976 et Meurtre en Musique (Murder With Too Many Notes) en 1999 dans lesquels il n’apparaît pas. Le point commun entre ses différentes apparitions dans la série est ce ton presque monocorde, cette attitude hautaine et cette implacable froideur que partagent chacune de ses incarnations. Dès Entre le Crépuscule et l'Aube, l'acteur se montre sinistre, d'une humeur linéaire, d'un tempérament vieux jeu, acariâtre et autoritaire. Un comportement qui participe de l'élaboration du meurtre puisque le Colonel Rumford qu'il interprète n'hésitera pas à utiliser le cadet Roy Springer (l'acteur Mark Wheeler) comme bouc émissaire...

La particularité de cet épisode provient donc du contexte puisqu'en s'imposant en ce lieu unique dans lequel il mangera, se douchera et se nourrira tout en continuant à mener son enquête, le lieutenant Columbo passera l'intégralité de Entre le Crépuscule et l'Aube à côtoyer cadet, bizuts et officiers. C'est ainsi donc qu'on le verra notamment manger au mess à la table du colonel, se laver dans les mêmes lavabos que les cadets, être brutalement réveillé au son du clairon (dans le meilleur des cas) ou par un soldats inconscient de réveiller non pas l'un des siens mais un lieutenant de police (dans le pire). Si Patrick McGoohan est parfois glaçant, Columbo est par contre tout à fait touchant dans ses rapports avec les jeunes militaires. Et notamment en ce qui concerne le récit tournant autour d'un trafic de cidre qui plus que de n'être qu'un sujet d'arrière-plan anecdotique, permet au scénario de Howard Berk de mettre en place toute une stratégie devant porter ses fruits lors des derniers instants.

Autre particularité de cet épisode, le meurtre : Si la série nous a jusqu'à maintenant habitué à des assassinats dont la forme se révélait généralement des plus classique, le meurtre de Entre le Crépuscule et l'Aube a ceci d'exceptionnel que le meurtrier agit en spectateur lorsqu'il survient. Devant l’énormité de l'événement, il demeure logiquement impossible de confronter le téléspectateur avec ce que l'on peut imaginer comme étant sans doute le meurtre le plus violent et le plus sanglant de toute la série (les débris du canon en témoignent). Comme par un fais étrange, et malgré la dureté du personnage, le spectateur pourra éprouver de la mélancolie mêlée d'amertume devant ce très haut gradé froid, dénué de sentiments, et pourtant relativement touchant dans sa vision éculée de l'armée. Patrick McGoohan l'incarne si parfaitement que l'on a tendance peut-être à mêler le personnage et son interprète. Une étrange relation se noue entre le militaire et le policier. Si le lieutenant Columbo garde comme objectif de faire tomber le coupable, on sent tout le respect qu'il éprouve pour ce militaire de carrière. Un Columbo sous forme de huis-clos original et relativement séduisant...

lundi 17 août 2020

Réaction négative de Alf Kjellin (1974) 🚬 🚬 🚬 🚬



Second épisode de la quatrième saison de Columbo, Réaction négative (Negative Reaction) du réalisateur Alf Kjellin, déjà auteur du sixième de la précédente (Au-delà de la Folie) démarre par un gros point d'interrogation... Alors que dans la plupart des épisodes le meurtre se justifie pour le meurtrier par un besoin pour lui d'acquérir le plus rapidement et le plus facilement possible un bon gros paquet d'argent ou de se débarrasser d'un maître-chanteur, on peut se demander pour quelle raison le photographe Paul Galesko choisit d'employer une méthode aussi radicale que définitive. Célèbre, riche, il aurait tout aussi bien pu se débarrasser de son épouse Françoise Eleonore Galesko (l'actrice Antoinette Bower) en divorçant. À moins qu'ici l'idée de perdre la moitié de sa fortune ne soit l'unique prétexte à commettre un meurtre, on ne peut pas dire que sur ce sujet, le scénario de Peter S. Fischer soit très clair. Mais passons sur ce détail qui au fond, n'a pas vraiment d'importance. Et puisqu'il faut bien commencer par un meurtre, pourquoi pas... Il faut dire que Paul Galesko a de bien bonnes raisons de vouloir ''faire taire'' son épouse. À l'entendre jacter comme une vieille rombière mal bais[Censuré] (le public français appréciera tout particulièrement de doublage effectué par l'actrice Liliane Gaudet), Françoise Eleonore Galesko mérite finalement bien le sort que lui accorde son photographe de mari. Un Paul Galesko qui de surcroît, va abattre ensuite l'ancien taulard qui sans le savoir l'a aidé à se constituer un alibi. Un certain Jacques Deschler (l'acteur Don Gordon), dont la mort est presque un crève-cœur pour le spectateur mais un passage obligé pour son assassin...

Sans entrer dans les détails, disons que Paul Galesko se démène pour faire croire que le bonhomme a enlevé son épouse afin de réclamer au photographe, une forte somme d'argent. Si ce n'était la présence du clochard Thomas Dolan (l'acteur Vito Scotti, doublé chez nous par le célèbre Francis Lax) lors du meurtre de Jacques Deschler, Columbo n'aurait peut-être pas très rapidement soupçonné l'époux de la victime. Pourtant, ce qui comme d'habitude ressemble à un crime parfait (celui de l'épouse) va très vite ressembler à un assassinat finalement pas si minutieusement préparé que cela. Face à Peter Falk, l'assassin est incarné par l'acteur, scénariste et réalisateur américain Dick Van Dyke qui incarne le photographe en question. Ni vraiment mauvais, ni tout à fait attachant, on semble comprendre que le meurtre de son épouse peut être également rattaché au fait qu'il soit particulièrement attiré par sa secrétaire Lorna McGrath (l'actrice Joanna Cameron) avec laquelle il entretient une relation ambiguë (on ne sait en effet pas vraiment s'ils sont amants).

Outre ses qualités qui en font un épisode éminemment supérieur au premier des deux seuls que réalisa Alf Kjellin, Réaction négative est connu pour l'une des séquences les plus dramatiquement drôles de la série. C'est en effet lors de la visite d'un centre d'aide pour les démunis que Columbo, dont l'apparence est généralement le sujet de remarques blessantes (même si le lieutenant ne laisse jamais rien transparaître), que la sœur de la mission Saint-Mathieu le prend pour un clochard, en insistant bien sur sa tenue et ce, même lorsqu'elle apprendra qu'il est en fait lieutenant de police. Un détail n'aura d'ailleurs pas échappé aux plus fins observateurs de la version française qui souffre d'une erreur flagrante de chronologie. Alors que Columbo tente à tout prix de faire comprendre à la sœur qui il est, elle lui coupe la parole et lui lance ''Un instant Lieutenant'' alors même qu'il ne s'est pas encore présenté. Ce qu'il fera d'ailleurs quelques minutes plus tard. Un anachronisme qui n'est dû qu'à une erreur de doublage puisque dans la version originale, les fans anglophones auront noté que la sœur n'évoque pas du tout la ''fonction'' de Columbo à ce moment très précis de l'épisode. Comme dans bon nombre d'épisodes, le lieutenant harcèle véritablement l'assassin. Quelques bonnes idées viennent relancer l'enquête de Columbo. Ce dernier remarque par exemple que Paul Galesko a connu Jacques Deschler en prison il y a quelques années alors qu'il y a passé plusieurs semaines pour photographier les prisonniers et le contexte dans lequel ils vivent. Quant à l'issue de l'intrigue, elle s'achève d'une manière sans doute peu réglementaire mais diablement efficace puisque l'assassin se trahi alors que Columbo a mis au point un traquenard particulièrement astucieux. Un très bon épisode...

mercredi 12 août 2020

Exercice Fatal de Bernard L. Kowalski (1974) 🚬 🚬 🚬 🚬 🚬



Cette quatrième saison de Columbo démarre en grandes ''pompes'' puisque Exercice Fatal (An Exercise in Fatality) de Bernard L. Kowalski (qui réalise ici l'un des quatre épisodes dont il aura la charge entre 1971 et 1976) est tout simplement l'un des meilleurs épisodes de la première des deux époques que couvre la série. Dans celui-ci, Peter Falk croise la route de Robert Conrad, acteur de cinéma mais aussi et surtout connu chez nous pour avoir interprété les rôles de James T. West dans la série Les Mystères de l'Ouest entre 1965 et 1969 et du major ''Pappy'' Boyington dans Les Têtes Brûlées entre 1976 et 1978. Exercice Fatal est l'occasion de le découvrir cette fois-ci dans le rôle de Milo Janus, propriétaire d'une salle de musculation et surtout collaborateur d'un certain Gene Stafford (l'acteur Philip Bruns) qui découvre que son associé détourne de fortes sommes d'argent pour son propre compte. Lorsque Milo Janus apprend que Gene Stafford a l'intention de divulguer les informations qu'il a récoltées à leurs actionnaires, l'escroc tente de raisonner son collaborateur mais le tue alors même que celui-ci tente de lui échapper. Afin de se constituer un alibi, Milo Janus déshabille Stafford et le vêt d'un survêtement avant d'emporter le corps jusque dans une salle de musculation où là, il l'allonge sur un banc et dépose sur sa gorge, une lourde haltère. Le meurtre ayant été prémédité, Milo Janus s'est au préalable saisi de bandes magnétiques enregistrées par sa secrétaire et sur lesquelles on peut entendre la voix de Gene Stafford. Par un ingénieux montage et en demandant à Jessica Conroy (la secrétaire en question) de bien vouloir se rendre chez lui et de recevoir les quelques amis qu'il a invité le soir-même, à son retour chez lui Milo Janus se débrouille pour que la jeune femme lui serve d'alibi lorsque résonne dans la salle principale, l'un des deux téléphones de la demeure raccordés entre eux. La voix de Stafford résonne alors de l'autre côté du combiné. Il s'agit cependant d'un enregistrement visant à faire croire que lorsque la mort du vieil homme est survenue, Milo Janus était présent, chez lui, accompagné de sa secrétaire ainsi que de quelques amis...

Milo Janus/Robert Conrad fait partie de ces quelques meurtriers de la série dont le capital sympathie s'avère relativement bas. Si l'on sait le lieutenant capable d'un acharnement forcené dont le ''pouvoir de persuasion'' peut avoir des conséquences parfois inattendues sur celui qu'il soupçonne d'avoir commis un meurtre, Milo Janus se comporte sensiblement comme le Docteur Barry Mayfield de l'excellent Le Spécialiste (A Stitch in Crime) réalisé par Hy Averback l'année précédente sans pour autant se révéler aussi épouvantablement désagréable que le personnage incarné alors par Leonard Nimoy. Très sûr de lui et de son alibi, Milo Janus ne sait pas qu'il a en face de lui un lieutenant capable de défaire pièce après pièce, tous les éléments qui constituent à priori le crime parfait. Comme cela arrive parfois dans la série, c'est en partie grâce à un événement se produisant de manière tout à fait hasardeuse (ici, une femme fait les lacets de chaussures de son fils dans un hôpital) que le lieutenant va pouvoir ''intégrer'' dans sa totalité, la logique meurtrière de l'assassin et ainsi le confondre en lui démontrant lors d'un final dont la démonstration demeure l'une des plus exceptionnelles de toute la série, que le meurtre qu'il croyait parfait, ou plutôt L'ALIBI qu'il pensait indémontable, est l'un des éléments qui mèneront à sa perte...

Notons que dans cet épisode, tout comme dans la plupart des soixante-neuf où le lieutenant Columbo a pour habitude de brosser les criminels dans le sens du poil, celui-ci félicite le tueur en lui faisant remarquer sa grande forme physique malgré son âge. Et pourtant, Robert Conrad n'a pas encore atteint les quarante ans lorsqu'il interprète le rôle de Milo Janus. Une anecdote particulièrement troublante et connue des criminologues en herbe lie cet épisode à un fait divers survenu... en France. En effet, Jean-Bernard Wiktorska, imprimeur à Sarcelles est retrouvé mort sur son banc de musculation, une haltère lui barrant la gorge, le 14 juillet 1995. Mais alors que l'autopsie conclue à une mort accidentelle, l'appel téléphonique d'une femme va tout remettre en question. Lors d'une seconde autopsie, le médecin légiste va en effet remarquer des blessures à la trachée incompatibles avec un écrasement provoqué par une haltère. C'est grâce à une enquêtrice du DRPJ de Versailles, fan de la série Columbo, que la lumière sera faite sur cet étrange fait divers. Comme quoi. Qu’il s'agisse de fiction ou de la réalité, le meurtre parfait s'avère toujours aussi complexe, voire impossible à réaliser...

mardi 11 août 2020

En Toute Amitié de Ben Gazzara (1974) 🚬 🚬 🚬 🚬 🚬



En Toute Amitié (A Friend in Deed ) possède diverses spécificités qui en font un épisode très particulier que l'on ne retrouvera qu'en de rares occasions. Si d'ailleurs l'on approfondit ses recherches, on notera qu'il y a peu, sinon aucun autre épisode semblable au déroulement de celui-ci. À noter tout d'abord à la réalisation, l'acteur Ben Gazzara, ami très proche de Peter Falk et également proche de l'acteur/réalisateur John Cassavetes avec lesquels il partagea la vedette de Husbands, l'un des grands chefs-d’œuvre que réalisa John Cassavetes lui-même en 1970. Ensuite, et c'est ce qui fait la principale différence de cet épisode par rapport aux soixante-huit autres, il n'y a ici pas une victime, mais deux. Ce qui jusqu'à maintenant n'a rien d'exceptionnel. Par contre, si l'on tient compte du fait que la première est victime d'un meurtre et la seconde d'un assassinat, En Toute Amitié fait toute la différence. Encore faut-il être capable de différencier l'un de l'autre. Le principe est simple à comprendre : Le MEURTRE est un acte perpétré sans préméditation quand l'ASSASSINAT a lui, été mûrement préparé et donc perpétré AVEC préméditation. C'est ainsi donc que nous seront présentés les deux homicides. Le premier, involontaire, commis par un certain Hugh Caldwell sur la personne de sa propre épouse. Un meurtre accidentel. Quant au second, il sera commis un peu plus tard par le commissaire de police Mark Halperin qui après avoir couvert les agissements de son ami en lui procurant un alibi apparemment infaillible se servira de lui pour se couvrir lui-même de l'assassinat de sa propre femme...

Intervient également dans ce huitième et ultime épisode de la troisième saison, le cambrioleur Artie Jessup (l'acteur Val Avery qui interprétera pas moins de trois autres personnages dans la série entre 1971 et 1975), connu par les autorités pour avoir commis plusieurs cambriolages dans le quartier où sont mortes les épouses Caldwell et Halperin. Un acharnement dont il sera la victime à son tour par le commissaire Halperin qui tentera de diriger les soupçons du lieutenant Columbo vers ce criminel qui n'a pourtant jusqu'ici, jamais commis de meurtres ! Une tentative qui restera bien entendu vaine puisque très rapidement, certains éléments de l'enquête pousseront Columbo à soupçonner et Caldwell, et Halperin. L'une des autres spécificités de cet épisode demeure d'ailleurs dans la tentative pour le lieutenant de faire toute la lumière sur leur supposée culpabilité et surtout sur le rôle que les deux hommes ont joué dans chacun des deux meurtres. Mais alors que le commissaire insiste pour que Columbo lui fasse parvenir le rapport sur les meurtres des deux femmes, notre célèbre lieutenant de police criminelle de Los Angeles traîne la patte, déjà convaincu de la culpabilité des deux époux et de l'innocence du cambrioleur...

Un cambrioleur dont il se servira d'ailleurs avec son accord afin de piéger de la plus formidable et jouissive des manières l'arrogant Mark Halperin. Un commissaire interprété par l'excellent Richard Kiley. Un être froid, calculateur, radicalement opposé au personnage qu'incarne l'acteur Michael McGuire qui dans la peau de Hugh Caldwell est manipulé du début à la fin par celui qui lui apporta son aide de manière tout à fait calculée en début d'épisode. Ben Gazzara réalise là, un épisode au moins à la hauteur des meilleurs de cette saison parmi lesquels Quand le Vin est Tiré de Leo Penn et Candidat au Crime de Boris Sagal. Cet épisode offre des scènes anthologiques dont un final absolument remarquable. L'attitude du meurtrier... pardon, de l'assassin est à l'image de ceux qui tentèrent de commettre le crime parfait et dont la recherche de perfection justement participa à leur arrestation. (ATTENTION SPOILER !!!) Comment en effet ne pas être totalement convaincu par cette séquence lors de laquelle Halperin croit avoir caché les bijoux d'un vol censément avoir été perpétré chez la première victime dans l'appartement du cambrioleur Artie Jessup alors que le dit appartement est en réalité celui que vient de louer le lieutenant Columbo ? Un final grandiose, imparable, jubilatoire, un formidable scénario de  Peter S. Fischer sur la base d'un récit de Ben Gazzara lui-même pour un Columbo affinant sans cesse une méthode mise à rude épreuve au fil des épisodes. Remarquable !

lundi 10 août 2020

Le Chant du Cygne de Nicholas Colasanto (1974) 🚬 🚬 🚬 🚬



Parce qu'il a commis un détournement de mineur il y a quelques années en arrière, le célèbre chanteur de country Tommy Brown est contraint par son épouse Edna d'accepter que l'argent des différentes recettes des concerts qu'il donne soient consacrées à la construction d'un temple. Privé de la moindre liberté, menacé par Edna et la jeune femme avec laquelle il coucha alors qu'elle n'était qu'une jeune adolescente, Tommy fomente leur meurtre lors d'un voyage en avion. Pilotant lui-même l'engin, il a dilué dans une bouteille isotherme renfermant du café, une forte dose de somnifères. Voyageant de nuit, il coupe le chauffage de l'avion en prétextant qu'il ne fonctionne pas. À l'arrière, les deux femmes se plaignent d'avoir froid. Tommy leur propose de boire du café pour se réchauffer et lorsqu'elles finissent par s'endormir, le chanteur de country se saisit d'un parachute qu'il a caché dans une sacoche habituellement réservée à des documents, le met sur son dos et saute de l'avion qui s'écrase alors un peu plus loin. Tommy atterrit à son tour brutalement et se brise la jambe. Se traînant difficilement jusqu'au lieu du crash, il se laisse glisser au sol et perd connaissance après avoir caché le parachute sous une souche d'arbre mort...

Pour ce septième épisode de la troisième saison intitulé Le Chant du Cygne (Swan Song), c'est le réalisateur Nicholas Colasanto qui pour la seconde fois se penche sur la série après l'excellent Symphonie en noir (Étude in Black), le premier épisode de la précédente saison qui mettait en scène John Cassavetes dans le rôle d'un chef-d'orchestre éliminant sa maîtresse. Cette fois-ci, Columbo va une fois encore baigner dans un univers musical puisqu'il y sera confronté à Tommy Brown, célèbre chanteur de country accompagné d'une troupe de choristes féminines et d'une épouse particulièrement attentive envers son comportement avec les jeunes groupies qui tournent autour de lui. C'est le chanteur de country Johnny Cash qui prête ici ses traits et son talent de musicien au personnage de Tommy Brown. Ici, il incarne un individu au caractère particulièrement complexe puisque sans être tout à fait détestable, on ne peut pas dire qu'il fasse partie de ces assassins parmi lesquels le lieutenant Columbo (et par prolongement, le spectateur) pourra facilement s''attacher. Johnny Cash y apparaît tel qu'il fut dans la vie. Vêtu de noir et accompagné de sa célèbre guitare qui l'accompagnait partout où il allait. Cette guitare justement qui participe dans cet épisode des doutes que va avoir Columbo concernant la responsabilité du chanteur dans la mort de Edna (l'actrice Ida Lupino qui interpréta le personnage de Doris Buckner dans le sixième épisode de la première saison Accident (Short Fuse) et de sa jeune protégée...

L'étrange relation qui se noue entre le tueur et le lieutenant Columbo n'est pas sans rappeler celle que ce dernier partagea avec le personnage d'Adrian Carsini qu'interpréta Donald Pleasence dans l'excellent Quand le Vin est Tiré (Any Old Port in a Storm). Le Chant du Cygne se clôt d'ailleurs de manière sensiblement similaire. À l'occasion de cet épisode, les fans du plus célèbre chanteur de country américain pourront l'entendre interpréter plusieurs œuvres de son répertoire, dont I Saw the Light ou encore la sublime mélodie, malheureusement très courte, intitulée Swan Song et qui donne son titre à cet épisode. Bien que la mise en scène et l'interprétation demeurent irréprochables dans ce que l'on peut considérer comme étant un excellent épisode de cette troisième saison, on pourra reprocher au scénario, une petite invraisemblance pourtant logique puisque participant de la résolution de cet épisode. En effet, alors que Tommy Brown cache le parachute dont il s'est servi pour sauter de l'avion avant de se laisser glisser vers le site du crash où brûlent les débris de l'engin, pourquoi donc ne choisit-il pas de s'en approcher accompagné du dit parachute afin de le lancer dans les flammes et de faire ainsi disparaître toute trace de son existence ? Un détail sans véritable importance au regard de la qualité de cet épisode et de la relation entre le tueur et un Columbo toujours aussi savoureusement incarné par Peter Falk...

jeudi 9 juillet 2020

Au-delà de la Folie de Alf Kjellin (1974) 🚬 🚬



Dans cet épisode intitulé Au-delà de la Folie (Mind over Mayhem) réalisé par Alf Kjellin (qui réalisera également le second de la saison suivante Réaction Négative (Negative Reaction)), notre lieutenant préféré est confronté au monde de la recherche scientifique. Le scénario de Steven Bochco, Dean Hargrove et Roland Kibbee adapté d'un récit de Robert Specht l'oppose en effet au Docteur Marshall Cahill qu'interprète l'acteur portoricain José Ferrer (The Greatest Story Ever Told, The Swarm, Dune). Père du jeune Neil qui s'est rendu coupable du vol du fruit des recherches du Docteur du Carl Finch, Marshall Cahill ne supporte pas l'idée que soit révélée au grand jour la supercherie de son fils qui doit recevoir très prochainement un prix de chimie pour les travaux qu'il a volé à Carl Finch. Ce dernier étant au courant, Marshall Cahill décide de l'éliminer et le renverse avec sa voiture dans l'allée de sa demeure avant de transporter le corps à l'intérieur et de faire croire qu'il a été tué durant un cambriolage. Mais avant de commettre le meurtre et afin de se constituer un alibi, le Docteur Marshall Cahill programme un robot depuis la salle des ordinateurs du laboratoire où il officie afin de faire croire à sa présence dans les lieux lors d'un exercice militaire...

Lorsque Columbo arrive sur les lieux du meurtre, son œil aiguisé ne peut s'empêcher de noter la présence d'une curieuse emprunte sur l'une des portes de la demeure de la victime. En faisant analyser cette tâche suspecte qui n'est autre que le cirage laissé par la victime lorsque son meurtrier l'a déplacé, Columbo comprend qu'il ne s'agit pas d'un simple cambriolage qui a mal tourné mais que l'assassin a tout manigancé pour faire croire que Carl Finch a été tué par des individus qui voulaient le voler... Loin d'être l'un des plus remarquables épisodes de la saga, surtout si l'on tient compte du dénouement qui ne repose pas sur LE détail qui tue mais plutôt sur la fibre paternel d'un homme qui acceptera d'avouer son meurtre pour que son fils ne se retrouve pas en prison à sa place, Au-delà de la Folie l'est, remarquable, pour d'autres raisons. Tout d'abord parce que le scénario y inscrit un personnage qui aurait pu dignement apparaître au générique du troisième épisode de la sixième saison Les Surdoués (The Bye-Bye Sky High I.Q. Murder Case) de Sam Wanamaker, et dans lequel Columbo sera confronté à une communauté de personnages au Q.I vertigineux. Ensuite, et c'est peut-être bien là l'événement ''sensationnel'' de cet épisode, les amateurs de science-fiction y découvriront la présence du mythique robot ''Robby le robot''.

En effet, cette machine douée d'une certaine intelligence (du moment que le bon programme est inséré dans ses entrailles) est apparue pour la première fois dans le film de Fred McLeod Wilcox, Forbidden Planet en 1956. Le public le verra par la suite réapparaître dans un certain nombre d'épisodes de séries télévisées telles que La Quatrième Dimension, Perdus dans l'Espace ou Wonder Woman ainsi que dans plusieurs longs-métrages cinéma tels, Gremlins de Joe Dante ou Objectif Terrienne de Julien Temple. C'est grâce à cette machine entièrement robotisée que l'assassin mettra en place son alibi. Mais c'est également à cause d'elle et du génie en herbe Steve Spelberg (notez la référence!) interprété par Lee Montgomery que Columbo découvrira de quelle manière a agit le tueur afin de se constituer un alibi. Bien que le scénario de Au-delà de la Folie (qui, je le répète, a été écrit à six mains) soit assez faible, le fan peut tout de même compter sur quelques séquences formidables comme l'entrée en scène du lieutenant dans une académie de dressage pour animaux de compagnie et dans laquelle il se voit répondre de la part du directeur auquel il demande de bien vouloir garder son chien : ''Je suis désolé...il démoraliserait les autres élèves...'' Par contre, parmi les faiblesses du scénario, les fans noteront la redondance de la séquence lors de laquelle le tueur camoufle lors d'un accrochage volontaire le pare-choc abîmé de la voiture incriminée dans le meurtre de Carl Finch. Une scène qui rappelle furieusement celle du précédent épisode Édition Tragique (Publish or Perish) de Robert Butler, et lors duquel le meurtrier camouflait le bruit d'un tir à l'arme à feu à l'aide d'un moyen similaire...

vendredi 26 juin 2020

Édition Tragique de Robert Butler (1974) 🚬 🚬 🚬



C'est la seconde fois que l'acteur Jack Cassidy intervient dans la série, trois ans après l'épisode Le Livre témoin (Murder by the Book) réalisé par un certain Steven Spielberg. Et comme dans ce que certains considèrent à juste titre ou pas comme l'un des meilleurs des soixante-neuf épisodes que constitue la série, il y évolue dans la peau de Riley Greenleaf. Un éditeur qui dans les prochaines semaines va perdre sa poule aux œufs d'or du nom de Allen Mallory (l'acteur Mickey Spillane). Celui-ci a en effet choisi de signer son prochain contrat avec un concurrent que Riley Greenleaf déteste profondément. On connaît la suite. L'éditeur décide d'éliminer Allen Mallory. Mais alors que dans la majorité des cas, pour ne pas dire l'intégralité des épisodes, l'homme ne se salira pas lui-même les mains dans un premier temps puisqu'il fera appel à Eddie Kane auquel il fait miroiter l'espoir d'éditer un ouvrage consacré à la conception de bombes artisanales...

La méthode employée par Riley Greenleaf est simple. Tandis qu'il fera tout pour se faire remarquer dans un bar ainsi que lors d'un accrochage en voiture qu'il aura volontairement provoqué au moment où aura lieu le meurtre de l'écrivain, Eddie Kane se rendra dans le bureau de Allen Mallory pour l'assassiner. Dans cet épisode, le tueur pousse le vice au point de tout faire pour se rendre suspect. Une mécanique qui va à l'encontre de tout ce à quoi nous a habitué la série. Fort d'un alibi en béton, le commanditaire de l'assassinat n'a pas grand chose à craindre face à un Columbo toujours aussi précis dans son analyse des événements. À part peut-être un détail : Eddie Kane ! On comprendra assez rapidement que la promesse d'éditer un ouvrage dont le titre est ''comment tout faire sauter en dix leçons'' demeurant une hérésie, Riley Greenleaf se trouve face à un dilemme. C'est ainsi que de commanditaire, celui-ci devient meurtrier en tuant le seul qui pourrait témoigner de sa complicité dans le meurtre de l'écrivain...

Toujours aussi somptueux, Jack Cassidy est donc confronté pour la seconde fois au Lieutenant Columbo et à l'univers de la littérature même si dans le cas présent, il se situe de l'autre côté de la profession puisque passant désormais de l'écriture à l'édition. Tout comme le Ken Franklin qu'il incarnait dans l'épisode réalisé par Steven Spielberg, il se retrouve dans Édition Tragique (Publish or Perish) de Robert Butler (déjà auteur du sympathique épisode Double Choc (Double Shock) l'année précédente) aussi démuni. Rappelons que dans Le Livre Témoin, il campait un écrivain qui aux côtés de Jim Ferris (Martin Milner) était l'auteur de romans à succès. On y apprenait cependant que son compagnon d'écriture était l'auteur presque exclusif de la plupart de leurs ouvrages. Dans Édition Tragique, le personnage de Riley Greenleaf risque de se retrouver dans une même situation de précarité puisque sa principale source de revenus va bientôt lui être arrachée au profit de la concurrence...

Dans cet épisode toujours admirablement incarné par Peter Falk, le lieutenant Columbo ne sera pas directement confronté à l'un des personnages les plus déséquilibrés auquel la série a donné naissance. Le rôle d'Eddie Kane est confié à l'acteur John Davis Chandler et à son regard très étrange. Inquiétant dirons-nous même, surtout que le scénario de Peter S. Fischer lui réserve quelques séquences particulièrement gratinées. À commencer par l'ouverture de cet épisode qui le montre en train de tester des explosifs de sa propre conception ou plus tard, lorsque le spectateur le voit jubiler à l'idée de voir son ouvrage consacré aux bombes artisanales être édité. Un individu à la ramasse dont Riley Greenleaf se servira des faiblesses intellectuelles afin de mettre à profit son projet de meurtre. Parmi les seconds rôles, les fans remarqueront la présence de l'acteur Alan Fudge qui interpréta notamment le personnage de C.W.Crawford dans la mythique série L'Homme de l'Atlantide en 1977/78 ou de Paul Shenar, vu dans le génial Scarface de Brian de Palma et grand habitué des rôles de méchants sur grand écran...

jeudi 18 juin 2020

Subconscient de Richard Quine (1973) 🚬 🚬 🚬 🚬



À force de prendre l'habitude de réapparaître dans la série une fois par saison, on aurait pu croire à l'époque que l'acteur Robert Culp y continuerait à venir s'installer en temps que tueur saisonnier. Et pourtant, sa présence dans l'épisode Subconscient (Double Exposure) de Richard Quine dans la peau de l'assassin sera la dernière. Ce qui ne l'empêchera pas de revenir à une dernière occasion dans l'excellent épisode Criminologie Appliquée (Columbo Goes to College) que réalisera dix-sept ans plus tard E.W. Swackhamer et qui le verra cette fois-ci non plus incarner le tueur mais le père de l'un d'eux (car oui, en effet, cet épisode mettra en scène deux étudiants assassinant leur professeur après qu'il les ait soupçonné d'avoir volé le questionnaire de leur futur examen). L'une des particularités de Subconscient s'avère pour notre célèbre lieutenant de la police criminelle de Los Angeles, l'emploi de la méthode dont usera en premier lieu l'assassin pour tuer sa victime. C'est donc en bon élève, en érudit, que Columbo va mettre en application l'enseignement dont il aura tiré profit durant l'enquête pour faire choir sa proie...

Dans ce quatrième épisode de la troisième saison, Robert Culp incarne à peu de chose près le même type de personnage qui le vit évoluer dans le second de la première, Faux témoin de Bernard L. Kowalski. Une fois encore, dans Subconscient, il s'agit pour l'assassin de manipuler sa future victime avant d'être contraint de s'en débarrasser par la voie la plus radicale qui soit. Mais si dans Faux témoin, la victime Lenore Kennicut (l'actrice Pat Crowley) perdait la vie par accident, c'est bien intentionnellement que le Docteur Bart Keppel, un chercheur et producteur dans le domaine de la publicité, se débarrasse de son client Victor Norris. En effet, ce dernier sachant que Keppel se sert des charmes de sa maîtresse Tanya pour séduire ses collaborateurs afin de pouvoir ensuite les faire chanter, il menace de toute révéler à la police s'il n'obtient pas très rapidement les négatifs qui le compromettent au bras de la jeune femme...

Chose amusante, lorsque Columbo apparaît à l'écran pour la première fois dans cet épisode, on le découvre dévorant des biscuits apéritifs. Un comportement qu'il justifie en évoquant le fait qu'il n'a pas eu le temps de dîner à la suite de l'affaire Hayward qu'il a résolu la veille même. Subconscient met en scène un Columbo face à une technique meurtrière assez particulière. En effet, l'épisode évoque l'usage d'images subliminales (des photos de boissons) inclues dans un film publicitaire projeté à l'occasion de la présence de Victor Norris qui quelques instants auparavant s'est gavé de caviar beaucoup trop salé. Résultat, alors que Bart Keppel est censé commenter les images du film publicitaire (en réalité, un enregistrement de sa voix sur cassette), sa victime quitte la salle et se dirige vers une fontaine à eau afin d'étancher sa soif. Débarque alors Keppel qui l'abat d'une balle avant de reprendre le chemin du pupitre où il était censé se tenir durant la projection...

Comme dans tout bon épisode de la série, il fallait à celui-ci trouver LE détail permettant au lieutenant Columbo de soupçonner le docteur Keppel. Si le meurtre qu'il commet sur la personne de Victor Norris (l'acteur Robert Middleton) semble parfait, le spectateur se rendre très rapidement compte que l'assassin a malheureusement laissé traîner derrière lui une succession de défauts dans la conception du meurtre qui arrangeront bien le méticuleux Columbo. A commencer par l'heureux hasard consistant en la présence de caviar sur lequel le lieutenant va se ruer avant de remarquer qu'il est beaucoup trop salé. Ensuite, interviennent pas mal d'éléments qui questionneront Columbo. Le fait que Keppel ait lancé l'enregistrement d'une cassette lors de la découverte du corps de sa victime (un moyen efficace d'effacer l'enregistrement de sa voix). Ou plus loin, cette fâcheuse coïncidence entre la scène de crime et la caméra de surveillance qui aurait pu filmer le meurtre et qui, seule parmi une dizaine d'autres, est en panne. Enfin, demeure la présence dans la salle de projection de Roger White (l'acteur Chuck McCann), le projectionniste, qui rapidement portera des soupçons envers Keppel qu'il ne tardera pas à vouloir faire chanter. Résultat : l'homme est également tué à son tour...

Le spectateur a droit là encore, à un excellent épisode pour cette troisième saison décidément de très grande qualité. Subconscient sera pour Richard Quine la troisième occasion de mettre en avant ses talents de metteur en scène après le quelque peu décevant S.O.S. Scotland Yard et le très réussi Requiem pour une Star. Après Le Spécialiste de Hy Averback, Subconscient est prétexte pour Columbo à mettre en avant l’ambiguïté du comportement du tueur face à certaines situations. Car tout comme le Docteur Barry Mayfield, Keppel est un homme d'une maîtrise totale qui tentera pourtant de faire valoir une certaine faiblesse à laquelle Columbo aura bien du mal à croire. Bien que la résolution du meurtre puisse paraître tout à fait fantaisiste, le spectateur s'amusera de voir finalement le meurtrier tomber dans le même piège qu'il tendit à sa première victime Victor Norris. Un très bon épisode même si sous certains aspects, Subconscient demeure légèrement en deçà des second et troisièmes de cette saison...

mardi 16 juin 2020

Candidat au Crime de Boris Sagal (1973) 🚬 🚬 🚬 🚬 🚬



Après un épisode tel que Quand le Vin est Tiré (Any Old Port in a Storm) de Leo Penn, le challenge se révélait difficile à relever pour le réalisateur Boris Sagal, déjà auteur du sympathique Dites-le avec des Fleurs (The Greenhouse Jungle) l'année précédente. Et pourtant, avec le troisième épisode de la troisième saison Candidat au Crime (Candidate for Crime), il n'aura pas eu à rougir de la comparaison puisqu'une fois encore, notre lieutenant préféré évolue dans l'une de ces remarquables intrigues dont les scénaristes ont le secret. Le contraire aurait d'ailleurs été étonnant vu que pour cet épisode, pas moins de quatre d'entre eux se sont attelés à l'écriture de ce Candidat au Crime dans lequel Columbo va se frotter à un homme politique s'étant rendu coupable du meurtre de son conseiller Harry Stark. Ne pouvant simplement s'en séparer puisque celui-ci détient des informations qui pourraient ruiner sa carrière de futur sénateur, Nelson Hayward met au point un très ingénieux stratagème visant à faire croire que le meurtre de Harry Stark est dû à un confusion de personne. Surtout qu'actuellement en campagne électorale, Hayward reçoit régulièrement des menaces de mort qu'il communique en général à la presse et aux autorités (en fait, des lettres anonymes écrites de sa propre main et visant à ''émouvoir'' ses futurs électeurs)...

Dans cet épisode, le candidat aux élections sénatoriales Nelson Hayward est sous le joug d'un conseiller ayant un contrôle total sur sa carrière. Contraint par Harry Stark de mettre un terme à sa relation avec sa maîtresse Linda Johnson (l'actrice Tisha Sterling), Hayward met en scène le meurtre de Stark et se constitue un alibi en brisant la montre de sa victime en ayant au préalable pris soin d'en changer l'heure. Une coutume chez les meurtriers qui veulent généralement modifier l'heure de la mort mais qui dans cet épisode participera des soupçons du lieutenant Columbo. Car en effet, lors d'une séquence où il ''identifie '' le costume et les chaussures de Harry Stark, Columbo remarque que l'homme avait pour habitude de ne porter sur lui que des vêtements de très bonne qualité. Ce qui en comparaison de la montre qui s'est apparemment brisée lors de la chute du corps ne colle pas vraiment avec le personnage. Incarnant un Nelson Hayward convainquant, l'acteur américain Jackie Cooper va être l'objet dans cet épisode d'un duel épique face à un lieutenant Columbo capable de passer de longues minutes à tenter de comprendre dans quelles circonstances s'est déroulé le meurtre de Harry Stark qu'interprète quant à lui l'acteur Ken Swofford...

L'une des spécificités de cet épisode réside d'ailleurs dans des séquences plus longues que la moyenne. Apparaissant pour la première fois à l'écran alors qu'il se trouve chez son dentiste, c'est lors d'un flash d'informations que Columbo apprend ce qui apparaît tout d'abord comme le meurtre du politicien. Se rendant à la dix-septième minute sur les lieux du crime, cette séquence à la mise en scène et au découpage exemplaires dure pas loin de huit minutes. Autant de temps qu'il en faut pour le lieutenant de s'imprégner des lieux, remarquer que le capot de la voiture de Harry Stark est froid, qu'il portait des vêtements résistants, ou que la lumière des lampadaires ne fonctionne plus. Quelques éléments dont se servira Columbo lors de la mythique scène opposant notre lieutenant préféré au politicien Nelson Hayward. Un peu plus de onze minutes lors desquelles Columbo démonte la ''mise en scène meurtrière'' de l'assassin de Stark. Bien que certaines hypothèses mises de côté par le scénario décrédibilisent certains propos du lieutenant (pourquoi, par exemple, ne pas évoquer la présence de deux hommes à bord du véhicule ayant servi au guet-apens ?), cette longue séquence demeure l'une des plus mémorables de toute la série.

Aux côtés de Jackie Cooper, le spectateur remarquera la présence de l'actrice Joanne Linville (Les Envahisseurs, Scorpio de Michael Winner en 1973) qui dans cet épisode interprète le rôle de l'épouse du futur sénateur, Victoria Hayward. L'acteur Robert Karnes incarne quant à lui le rôle du sergent Vernon un an après avoir interprété celui du sergent... Grover !!! Si Candidat au Crime est exceptionnel du point de vue du scenario, de la mise en scène et de l'interprétation (sans oublier la partition musicale signée de Dick DeBenedictis), outre les différentes séquences opposant Columbo à Hayward, ce que retiendra sans doute davantage encore le spectateur est ce final absolument remarquable. Cette tentative de meurtre montée de toutes pièces par Hayward et disséquée par le lieutenant ayant mis à contribution le temps qui lui était imparti pour visiter la pièce où s'était enfermé le futur sénateur avant les élections. Ou comment, une fois encore, prendre l'assassin à son propre piège et ce, de manière tout à fait admirable...

lundi 15 juin 2020

Quand le Vin est Tiré de Leo Penn (1973) 🚬 🚬 🚬 🚬 🚬



Si quatre épisodes en arrière Columbo croisait la route de l'un des plus antipathiques des meurtriers en la personne du Docteur Barry Mayfield (Leonard Nimoy) dans l'excellent Le Spécialiste réalisé par Hy Averback, celui de Quand le Vin est Tiré (Any Old Port in a Storm) de Leo Penn est d'un tout ordre. D'abord parce que la victime meurt sous le coup d'un geste impulsif et incontrôlé que l'on rangera sans doute dans la case des homicides commis par accident. Ensuite, parce qu'Adrian Carsini demeure l'un des meurtriers les plus remarquablement attachants des soixante-neuf épisodes que compte la série. Touchant parce qu'étant différent de la majorité de ceux auxquels le lieutenant a eu et aura à faire durant toute sa carrière. Car si Adrian Carsini peut se vanter d'être un fin connaisseur en vins, un œnologue comme il en existe peu à travers le monde, cela ne l'empêche par de demeurer humble et de ne jamais se considérer supérieur au petit flic en imperméable froissé qu'il a face à lui. Autant dire que dans une série où le lieutenant croisera une sacrée panoplie de personnages tous plus exubérants et narcissiques les uns que les autres, celui que met en scène Leo Penn est des plus reposant...

Diffusé pour la première fois le 7 octobre 1973 aux États-Unis et chez nous le 6 décembre de l'année suivante, Quand le Vin est Tiré met donc en scène l’œnologue Adrian Carsini, lequel a voué sa vie entière au vin. Propriétaire d'une incroyable collection de bouteilles, il dépense sans compter la fortune que rapporte le vignoble familial pour ajouter à sa collection des vins hors de prix. Mais il y a un hic:le vignoble appartient en fait à son demi-frère Enrico, lequel ne partage absolument pas la passion d'Adrian et annonce à ce dernier qu'il a l'intention de vendre le domaine à de vulgaires producteurs de ''piquette''. Furieux à l'idée de tout perdre, et à défaut de pouvoir convaincre son demi-frère de changer d'avis, Adrian se saisit d'un lourd objet et frappe Enrico à la tête, lequel s'effondre au sol. Mais alors que ce dernier n'est encore qu'inconscient, Adrian le transporte jusqu'à la cave où il conserve précieusement sa collection de grands crus, l'attache et l'enferme avant de partir pour une semaine à New York en compagnie de sa secrétaire Karen Fielding. À leur retour, Adrian revêt Enrico désormais décédé de la combinaison de plongée dont il était féru avant de le transporter et de le jeter à la mer. Dans ce même laps de temps, la fiancée de la victime qui devait l'épouser quelques jours auparavant se présente devant Columbo, inquiète de la disparition de celui qu'elle aime...

Le fan de la série Columbo tient là avec Quand le Vin est Tiré, l'un des plus fameux épisodes de la série. On ne retrouvera que très rarement ce type de relation entre le lieutenant et celui qu'il traque. On a beau le voir réagir de manière différentes selon les circonstances tout en ayant souvent à l'esprit que ses rapports ''d'amitié'' avec tel ou tel assassin nourrissent son désir de prouver leur culpabilité, dans le cas présent, les choses s'avèrent bien différentes. Nous sommes donc bien plus proche d'un Requiem pour une Star de Richard Quine ou des années plus tard du Meurtre aux deux Visages (It's all in the Game) de Vincent J. McEveety diffusé chez nous pour la première fois le 10 novembre 1994 que de l'infecte personnage rencontré dans Le Spécialiste. À tel point, oui, que l'arrestation est une véritable déchirure pour le fan qui le temps d'un épisode des plus précieux aura la tristesse d'assister à l'arrestation d'Adrian Carsini. Un œnologue campé avec une très grande finesse par l'acteur britannique Donald Pleasence, immense interprète d'une foultitude de rôles aussi bien sur grand écran qu'à la télévision. Les amateurs de fantastique et d'épouvante le reconnaîtront aisément pour avoir incarné à plusieurs reprises le personnage du docteur Loomis dans la saga horrifique Halloween ainsi que dans toute une série de films de genre dont certains sont considérés par les spécialistes comme d'authentiques classiques (Death Line de Gary Sherman en 1972, Alone in the Dark de Jack Sholder ou bien Phenomena de Dario ,Argento...).

À ses côtés l'on retrouve la grande actrice américaine Julie Harris, interprète de A l'Est d'Eden d'Elia Kazan, de La Maison du Diable de Robert Wise ou de Mort sur le Grill de Sam Raimi. Un sacré pedigree pour celle qui dans cet épisode de la série est ''discrètement'' amoureuse de son patron. D'ailleurs, le spectateur constatera une certaine froideur de la part d'Adrian Carsini vis à vis de Karen Fielding, laquelle tentera vainement de le pousser au mariage avant que l'arrestation d'Adrian ne vienne délivrer celui-ci de l'hypothétique future emprise de sa secrétaire. Dans Quand le Vin est Tiré, l'entrée en scène de Columbo est différente des épisodes précédents. En effet, alors qu'habituellement on le voit soit chez son vétérinaire, soit directement sur les lieux du crime, il est cette fois-ci assis derrière son bureau face à une fiancée éplorée devant laquelle il se trouve démuni. Quand le Vin est Tiré est aussi et surtout l'occasion d'en apprendre davantage sur la vie privée de notre célèbre lieutenant. On apprend en effet que son grand-père était lui-même propriétaire d'un vignoble en Sicile et qu'il a des enfants. Des affirmations à prendre bien évidemment avec des pincettes puisque notre grand manipulateur sait jouer de la corde comme personne lorsqu'il s'agit d'orienter son enquête. Très bel épisode, et certainement l'un des plus touchants (le final est en ce sens remarquable) Quand le Vin est Tiré repose presque exclusivement sur les rapports entre policier et assassin, merveilleusement interprétés par Peter Falk et Donald Pleasence...